JARDINS
D’ORIENT
de
l'Alhambra au Taj Mahal
Courez voir l'exposition "Jardins
d'Orient" à l'Institut du Monde Arabe ! C'est un enchantement, une
merveille.
A travers un parcours intelligemment balisé
de divers supports (commentaires, objets d’arts, vidéos), on apprend à
connaître l’importance d’un jardin. « Apprivoiser la nature », « dessiner
un jardin d’Orient », « miroir de la société », « fascination
réciproque », « source de modernité » sont autant d’étapes pour
comprendre pourquoi tout commence (Eden) et termine dans un jardin (paradis, de
l’iranien avestique pairidaēza
qui signifie « jardin enclos »). Alpha et oméga de notre humanité, le
jardin est notre équilibre. D’où le fait que de nombreuses villes modernes
repensent leur conception en introduisant de grands jardins. A la fin du
parcours, vous verrez plusieurs vidéos qui vous présenteront divers projets menés
en ce sens en Orient.
Au fil de la visite, vous croiserez de
nombreuses œuvres d’artistes, essentiellement orientaux. Dès l’entrée, on est
frappé par la somptueuse tapisserie de l'Egyptien Ali Selim devant laquelle on
pourrait passer des heures à détailler là un canard, là un dattier, un groupe
de femmes, un ensemble de maisons, une rivière sinueuse, des oiseaux qui passent
devant des nuages, etc.
On sourit devant Lovers Picnicking, « maxiature » de l'Iranienne Soody
Sharifi qui revisite avec humour les miniatures persanes et les associe grâce
au collage au monde iranien tel qu’il est aujourd’hui.
Concert
nocturne dans un jardin, tableau
de la Libanaise Fatima El-Hakb est une version lumineuse du thème classique qui
associe jardin, musique et conversation.
Dans les années 1920, Henry Valensi (Français
né à Alger) peint Dans les jardins d’Alger
dans lequel il reproduit la composition en quatre parties d’un jardin oriental,
tel que l’ont conçu les Perses puis les Iraniens. Une salle entière est
consacrée à ce chapitre essentiel pour comprendre la conception religieuse du
jardin musulman : un enclos au milieu duquel une fontaine irrigue quatre
carrés séparés par des rigoles ou des allées ; les quatre rivières du
paradis musulman, où coulent une eau pure, du lait, du vin et du miel. Dans les
carrés, une profusion de plantes avec une prédilection pour les cyprès, les agrumes,
la vigne et les roses car le paradis est aussi une école des sens : la
vue (couleurs, symétrie de l’agencement du jardin), l’ouïe (l’eau qui coule
toujours calmement, le chant des oiseaux, la musique), le goût (les fruits
comme la grenade, la figue et la datte) et le toucher associé à l’odorat.
Le jardin est le miroir de notre société,
comme le suggère la sculpture "Olivier" du Palestinien Abdul Rahman
Katanani, symbole de paix au milieu des fils barbelés.
Du côté technique, on apprend comment fonctionne la vis d'Archimède grâce à laquelle,
selon la légende, étaient irrigués les jardins suspendus de Babylone, dont un
film propose une reconstitution 3D.
Un documentaire
ludique, poétique et très complet de Valéry Gaillard vous dira tout sur l’incroyable
histoire du « tapis jardin » de Cracovie (mais tissé en Iran) et sur l’importance
de ce genre dans la société iranienne.
Le passage qui m’a particulièrement touchée est celui consacré au Simorgh, oiseau fabuleux de la mythologie persane, parce qu’il m’a rappelé la lecture de la Conférence des oiseaux (XIIe) de Al-Din Attar, ce conte mystique qui relate la quête de trente oiseaux partis à la recherche du Simorgh, leur roi, et qui, au terme d’une série d’aventures, de doutes, de découragements, d’abandons et d’incertitudes, se retrouvent face à un miroir qui leur renvoie leur image : le Simorgh, c’est eux-mêmes car « si morgh » en persan, signifie « trente oiseaux ».
Voilà peut-être pourquoi les commissaires ont choisi une représentation de cet oiseau pour représenter l’exposition : le jardin, c'est le meilleur de nous-mêmes.
Le passage qui m’a particulièrement touchée est celui consacré au Simorgh, oiseau fabuleux de la mythologie persane, parce qu’il m’a rappelé la lecture de la Conférence des oiseaux (XIIe) de Al-Din Attar, ce conte mystique qui relate la quête de trente oiseaux partis à la recherche du Simorgh, leur roi, et qui, au terme d’une série d’aventures, de doutes, de découragements, d’abandons et d’incertitudes, se retrouvent face à un miroir qui leur renvoie leur image : le Simorgh, c’est eux-mêmes car « si morgh » en persan, signifie « trente oiseaux ».
Voilà peut-être pourquoi les commissaires ont choisi une représentation de cet oiseau pour représenter l’exposition : le jardin, c'est le meilleur de nous-mêmes.
Alors que je
traînais comme d’habitude dans la magnifique librairie, et choisissais quelques
cartes postales, une dame s’est approchée et m’a dit : « N’est-ce
pas, cette exposition réconcilie avec le genre humain ? Finalement, on
sait faire autre chose que détruire ! » C’était vrai. Quand j’écrivais
plus haut enchantement, j’aurais pu
tout autant écrire espoir, quand j’écrivais
merveille, j’aurais pu écrire vie.
« En notre époque profondément bouleversée,
où les valeurs humaines s’amenuisent, où l’art et la culture sont mis en
danger, quoi de plus intime, de plus rassurant que le jardin. Il réveille au
plus profond de nous l’image paisible d’une nature bienfaisante. L’art des
jardins parle d’héritage, de culture, d’environnement, mais aussi de société,
du bien vivre ensemble et de liberté, abolissant toutes les barrières. »
(Sylvie Depondt, catalogue de l’exposition,
p. 9)
Après, allez dehors, dans le jardin anamorphosé conçu par le paysagiste Michel Péna, et lisez assis dans de confortables fauteuils, dégustez une tartelette aux dattes et aux pistaches... en respirant l'odeur des roses.
Jardins d’Orient. De l’Alhambra au Taj Mahal, Institut du Monde Arabe, jusqu'au 25 septembre 2016.