mardi 1 mai 2012

Des livres : McCall Smith et Precious Ramotswe

Alexander McCALL SMITH
(Né en 1948)

 

Precious Ramotswe,
première femme détective du Botswana



Quand le père de Precious Ramotswe décède, il lui laisse en héritage un beau troupeau de bétail. Soucieuse de ne pas dépenser cet héritage gagné à la sueur du front de ce père adoré, elle charge un ami de confiance resté au village de le faire prospérer mais en vend une partie, suffisamment pour réaliser son rêve et faire ainsi fructifier un autre aspect du legs paternel, son talent pour l’observation et sa compréhension très personnelle de la vie. C’est ainsi que la jeune femme monte à Gaborone, la capitale, et ouvre la première agence de détective dirigée par une femme.

Mma Ramotswe est un personnage créé par l’Ecossais Alexander McCall Smith, et est déjà l’héroïne de douze romans. Si la vie que vous menez vous stresse, si des problèmes vous font perdre foi en l’avenir, si l’égoïsme et l’agressivité de la gent humaine vous attristent, lisez les aventures de cette femme courageuse mais avant tout généreuse et pleine de bon sens, d’une intelligence inouïe car elle n’a peur de rien, et surtout pas du pire de la nature humaine. Mma Ramotswe comprend sans excuser, condamne sans exclure.

Je vous entends d’ici : « Encore un personnage pétri de bons sentiments ! » Et vous me citez Gide qui a affirmé, à raison d’ailleurs, qu’on ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments. Je vous arrête immédiatement : il ne s’agit pas ici de morale simpliste. Les affaires – pas toutes criminelles, je tiens à le préciser d’emblée – auxquelles Precious est confrontée ne sont pas très reluisantes pour le genre humain. Nous sommes au Botswana, et l’auteur nous révèle ce petit pays situé au nord de l’Afrique du Sud qu’il connaît bien pour y avoir vécu et travaillé pendant de nombreuses années, après avoir grandi au Zimbabwe.

Pourtant, la première chose qui frappe dans cette œuvre, c’est un amour immense (et touchant) pour un pays, amour qui pour être naïf n’en est pas moins revendicateur. Notre détective sait très bien ce qui pourrait le détruire (sida, sorcellerie, corruption, trafic d’organes, pauvreté) ; cela, elle le combat de toutes ses forces et ses compétences. Le Botswana, c’est l’Afrique telle que les médias ne nous la montrent pas, une Afrique idéalisée sans doute – je ne sais pas, je n’y suis malheureusement jamais allée – mais une Afrique qui revendique le bien-fondé de ses traditions, coutumes et art de vivre.

Quant aux personnages, ils ont une telle présence que vous avez l’impression qu’ils pourraient se matérialiser d’un instant à l’autre.
Tout d’abord Mma Ramotswe : grâce à elle, j’ai notamment découvert le thé rouge et l’ai adopté. Dans certaines de mes rêveries, il m’est arrivé plus d’une fois de désirer m’asseoir sur le pas ombragé de sa porte pour en déguster une tasse avec elle, l’écouter me parler de son père, entendre dans ses silences sa blessure initiale, celle qui l’a rendue si forte et indestructible, revendiquer sa « constitution traditionnelle ». Quand Mma Ramotswe est là, elle vous apporte la paix tout simplement parce qu’elle vous réconcilie avec vous-même.
Autour d’elle gravitent des personnages tout aussi attachants : sa secrétaire Mma Makutsi, le garagiste J.L.B. Matekoni qui deviendra son mari, son amie Mma Potokwane, la directrice de l’orphelinat, les ineffables stagiaires du garagiste, Charlie et Fanwell. A eux tous, ils glorifient les choses insignifiantes : les chaussures de Mma Makutsi lui tiennent de longs discours ; Rra Matekoni ne cesse de voir dans la mécanique d’une voiture un reflet de l’humanité ; les adolescents Charlie et Fanwell ont la superficialité, la maladresse, l’égoïsme et la violence qui correspondent à leur âge ; le cake de Mma Potokwane est si bon qu'on lui pardonne en partie son caractère tyrannique.
Grâce à eux, on sourit, on rit, on s'agace, on s’étonne, on s’émerveille.

Pour ceux qui veulent prolonger le plaisir, sachez qu'Anthony Minghella a créé pour la BBC une série télévisée avec la chanteuse de soul Jill Scott dans le rôle principal, Anika Noni Rose dans le rôle de Mma Makutsi et Lucian Msamati dans le rôle de J.L.B. Matekoni. Elle innove en incluant un personnage qui n’apparaît pas dans les romans, BK, le voisin coiffeur dont le salon porte le nom très mccallsmithien de "Last Chance Hair Salon". Il est interprété par Desmond Dube, chanteur et acteur sud-africain.  
Du 4 au 25 août 2011, Arte a diffusé cette série sous le titre L’Agence n°1 des dames détectives.

Les romans comme la série sont autant d’invitations à flemmarder et à prendre le temps de réfléchir. En ces temps de rentabilité érigée en dogme, je trouve cela reposant. Surtout, il est fort utile de rappeler que ce qui est rentable pour certains ne l'est pas forcément pour d'autres. Par ailleurs, l’esbroufe est malheureusement trop souvent le corollaire de la soi-disant rentabilité. Je ne suis pas dupe. J’espère que vous non plus.

Série télévisée inspirée des romans d’Alexander McCall Smith

Les enquêtes de Mma Ramotswe aux Editions 10/18, traduites de l’anglais (Grande-Bretagne) par Elisabeth Kern
Mma Ramotswe détective (The No. 1 Ladies' Detective Agency, 1998)
Les Larmes de la girafe (Tears of the Giraffe, 2000)
Vague à l’âme au Botswana (Morality fir Beautiful Girls, 2001)
Les Mots perdus du Kalahari (The Kalahari Typing School for Men, 2002)
La Vie comme elle va (The Full Cupboard of Life, 2004)
En charmante compagnie (In the Company of Cheerful Ladies, 2004)
1 cobra, 2 souliers et beaucoup d’ennuis (Blue Shoes and Happiness, 2006)
Le bon mari de Zebra Drive (The Good Husband of Zebra Drive, 2007)
Miracle à Speedy Motors (Miracle at Speddy Motors, 2008)
Vérité et feuilles de thé (Tea Time for the Traditionally Built, 2009)
Un safari tout confort (The Double Confort Safari Club, 2010)
Le Mariage avait lieu un samedi (The Saturday Big Tent Wedding Party, 2011)

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