Shower
(洗澡)
Film chinois de ZHANG Yang (1999)
Ce film raconte les relations existant entre un père, Maître Liu, et ses deux fils : Da Ming, l’aîné, est parti en quête de reconnaissance sociale qu’il a d'ailleurs obtenue ; Er Ming, le cadet, simple d’esprit, est resté auprès de son père. Ce dernier tient l’un des derniers établissements de bains publics traditionnels de Pékin. Un jour, Er Ming envoie à son frère un dessin : Da Ming croit comprendre que son père est malade et rentre à Pékin.
Très vite, il se sent comme un intrus. En effet, le couple formé par le père et son fils cadet est tout en connivence et complicité. Même si Er Ming ne peut cacher sa joie de retrouver son frère aîné, le père semble mécontent de l’arrivée soudaine de ce fils qui l’a renié. Da Ming se contente alors d’être le spectateur d’une relation filiale qu’il n’a pas su valoriser. Toutefois, sa douleur est rentrée et ne se traduit que dans les regards qu’il pose sur son frère et son père bien sûr, mais aussi sur les clients du bain qui, il le comprend vite, forment avec les siens une famille chaleureuse et solidaire. Da Ming traverse ainsi le film en solitaire, solitude qui culmine quand, à la mort du père, il annonce à sa femme que son frère est simple d’esprit et qu’il va devoir le prendre chez lui : elle lui raccroche au nez.
C’est justement ce frère qui va le réconcilier avec lui-même. Certes, le simple d’esprit à l’intelligence émotionnelle plus élevée que les autres est un thème classique, mais ce n’est pas uniquement cela. Er Ming est l’héritier de son père, au sens le plus littéral du terme : il a hérité de lui sa chaleur humaine, son sens mais aussi son goût de la communication, sa joie de vivre aussi, ainsi qu’une forme de simplicité qui rend ridicule toute ambition autre que celle de vouloir être « quelqu’un de bien ». C’est cet héritage que révèlent en contrepoint toutes les scènes avec les clients du bain, empreintes d’une telle tendresse et d’une telle délicatesse qu’elles vont finalement réveiller chez Da Ming la nostalgie d’une enfance et d’une adolescence dont on devine qu’il ne les a pas estimées à leur juste valeur.
On pourrait dire que Shower est un film initiatique, mais à rebours, une revalorisation des origines en quelque sorte. Il est par conséquent aussi une dénonciation de la modernité posée en dogme, vide de sens et d’affect, inhumaine enfin. Pendant tout le film, on a ainsi l’impression que le bain mais aussi tout le quartier sont autant de havres dans « cet enfer moderne » : ils sont pourtant voués à la démolition…
Fable poétique, peut-être nostalgique d’une Chine des traditions millénaires, Shower est pourtant un film résistant car empli d’espoir : O sole mio !
ZHANG Yang
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